Les BOBOS ET leurs PLANTES VERTES

Vous voyez, les plantes… La grande mode des plantes à côté de son vase en cuivre et de sa cafetière à piston ? Le cactus stylé à côté du coussin à motif scandinave et du fauteuil en cuir vintage ? La plante grasse miniature disposée dans la cuisine entre ses bocaux de graines de courge bio et ses sachets kraft d’herbes séchées… Vous voyez ?

Oui on parle de ces plantes-là, nos chères plantes de bobos !

1. La plante enfant

Pour une bonne partie, acheter une plante est un peu comme accoucher d’un petit être sans défenses.

On l’achète dans un tout petit magasin au nom farfelu dans lequel s’entasse des milliers d’espèces de plantes chelou et on choisit pendant des heures celle qui sera l’élue.

Ensuite on note tous les conseils de la dame passionnée des plantes - une sorte de fée sylvestre à grande lunettes en plastique rouge posées sur le bout du nez - qui nous explique comment la baigner, comment la soigner, comment l’aimer, toujours de manière bio bien sûr.

45 euros plus tard et un sac en papier kraft contenant le bébé plante, on repart heureuse, le sourire aux lèvres de la jeune maman voyant son bébé dormir mais ne sachant pas encore qu’il va brailler toutes les nuits.

Présentation avec le « papa », le mec, qui regarde la bête l’air interrogateur  : « C’est quoi ce lierre bizarre ? » Bon, il est un peu moins emballé que nous par notre désir d’adoption de plante… Mais tant pis, on lui annonce fièrement que c’est Cactusio, parce que c’est un cactus mâle.

Malheureusement Cactusio sera lancé violemment à travers la pièce quelques mois plus tard lorsqu’on apprendra que notre mec a pris un café avec son ex. Oui bon hein, ‘y a plein de gens qui font tomber leur bébé…

2. La plante design

L’adoption de la première plante est une chose, mais il y a aussi le choix de la plante « design ». Celle qui coûte 200 balles et que l’on achète comme un investissement sur le long terme : « Parce que ça, ça se démodera jamais. »

Ça… C’est pas si sûr. Quand on regarde en face notre espèce de ficus géant à feuille large, on se demande vraiment si le mec s’est pas un peu foutu de notre gueule en nous vendant ça… Si ça se trouve, il s’est amusé avec un pote à croiser un pamplemousse avec un buis et nous a sorti que c’était « LA plante hype du moment ma chériiiiie ».

Alors, chaque fois qu’une pote passe chez nous, on lui sort que c’est la plante hype du moment qui nous a coûtée un bras mais qui est hyper rare parce qu’elle n’existe que dans trois pays d’Afrique (mais qu’est-ce qu’elle fout à Paris d’ailleurs ?)

Pour rentabiliser la bête, on l'a foutu en plein milieu du salon, genre devant la télé, devant le fauteuil, devant la table basse. C’est un peu comme un gros chat obèse qui se foutrait toujours là où il ne faut pas.

D’ailleurs, la plante design finira brisée en deux parce qu’à une soirée trop alcoolisée, votre pote Jojo l’a déguisée en drag-queen et a dansé le tango avec elle. Ce qui provoqua sa scission immédiate.

Il est con Jojo, mais c’est vrai que sa danse valait bien 200 bales.

3. La plante connexion à la nature

Ensuite vient la plante « connexion à mère nature et ouverture des chakras ». Là, c’est notre côté gourou des forêts qui ressort. On s’est vraiment dit qu’en se focalisant intensément sur cette plante, la nature allait venir à nous et nous permettre de mieux comprendre l’univers, le cosmos, les créatures féériques… (Ouais c’est notre période coup de mou souvent).

Lors de cette période, on se met à acheter tout un tas d’huiles essentielles, de flacons bizarres d’extrait de bourgeons ou d’algues mijotées et on englouti tout ça le matin à jeûn en prétendant que c’est délicieux (en vrai ça a goût de fosse à purin).

On sent que notre corps réclame de la purification et un retour aux sources (on sent surtout ses quatre kilos en trop et son foie prêt à exploser tant on a forcé sur les apéro-charcutaille-frometon…)

Mais du coup, tous les matins on va parler à notre plante, on caresse ses feuilles, on lui dit « Tiens ? Tu as les feuilles qui tombent… Tu nous ferais bien une petite somatisation post traumatique… TU VOIS GEORGES, je t’avais bien dit qu’il fallait pas lui couper les branches !!! »

Et puis un jour, après vos dix-huit cures de propolis et votre indigestion aux graines de Chia, vous vous rendez compte que c’est la plante qui vous fait aller mal. Plus de soleil, moins de soleil, trop d’eau, j’ai soif... Jamais contente.

Elle finira par nous courir tellement sur le haricot qu’on laissera sécher ses branches pour les mettre dans des vases IKEA en déco dans les toilettes.

4. La plante killeuse d’ondes

Ah celle-là, c’est notre côté insurgé qui nous a poussé à l’acheter. C’est souvent après un reportage Arte sur les ondes ou un article sur les maux provoqués par les téléphones portables que l’on court chez le jardinier M. Monceau. On veut absolument purifier notre appartement de tous ces wifi and cie et avoir l’impression de vivre dans une yourte au Paraguay.

On la recommande d’ailleurs à tout le monde : « Ah moi depuis que j’ai acheté mon Spathiphyllum, je dors tellement mieux, c’est le jour et la nuit ouais ouais ouais. »

Oui enfin on oublie de dire qu’on continue de dormir avec son portable à quatre centimètres de la tête et qu’on n’éteint pas la box pour dormir (bah non c’est bon il y a la plante qui le fait !)

Un jour on découvre que notre plante salvatrice a… UNE BÊTE ! Oh pétard, on la chope par les feuilles et l’extirpe violemment de son pot : un gigantesque verre qui se balade dans la terre.

Terreur et tremblements, on balance la chose par la fenêtre et demande à Zozo d’aller la mettre dans un sac poubelle et de la jeter à deux pâtés de maison plus loin.

Non mais ‘y a des limites quand même, on ne va pas cohabiter avec Godzilla sous le même toit.

5. La plante crevée

Finalement, c’est celle qui dure, celle que l’on aime, celle qui ne nous emmerde pas. C’est cette petite fougère à demi crevée que l’on garde depuis des années dans son pot d’origine et qui ne demande aucun entretien.

Même notre mec l’aime bien, elle le fait marrer, il passe devant et il lui dit « Alors vielle mémère on tient le coup ? » C’est un peu notre tatie Danielle de la maison, elle est sur la bibliothèque et nous a vu rire, pleurer, nous faire larguer, nous aimer…

C’est une vieille plante cabossée à notre image. Un peu pourrie, avec son charme et ses défauts, pas très à la mode, pas très utile mais vachement attachante…

 

Tout nous quoi !

 

Léa Philippe

Crédit Photo / Pinterest